#9 – Rencontre avec Vincent Marçais, architecte d’intérieur et alumni ESE
Vincent Marçais était chef de projet au sein d’ESSEC Solutions Entreprises en 1988. Après avoir été EVP au sein de Paramount, il est actuellement architecte d’intérieur.
Vincent Marçais revient sur ses années à l’ESSEC et son changement de carrière, passant du monde de l’audiovisuel à celui de l’architecture.
Ses années à l'ESSEC
Quels ont été les moments forts de votre ESSEC ?
J’ai eu un parcours plutôt classique. En effet, après deux années de prépa au lycée Janson de Sailly, j’ai eu la chance d’intégrer l’ESSEC et j’en garde un très bon souvenir.
En ce qui concerne mes aspirations professionnelles, j’ai par exemple eu l’occasion d’intégrer la chaire stratégie commerciale en parallèle de ESE. Cela m’a permis de me spécialiser dans le marketing car c’était un domaine qui m’attirait à l’époque.
En ce qui concerne mes stages, j’ai eu la chance d’effectuer un stage à Washington chez Airbus et un autre chez Citroën. À ma sortie d’école, j’avais donc presque un profil type « ingénieur ».
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous intéresser aux métiers liés à l’audiovisuel ? Aviez-vous un attrait pour ce domaine avant d’entrer à l’ESSEC ?
J’ai toujours eu un attrait pour le cinéma et, peu après ma diplomation, je suis tombé par hasard sur une annonce dans Le Figaro pour être chef de produit chez CBS Folks. Le métier m’a plu et je m’entendais très bien avec mon patron. C’est comme ça que ma carrière a débuté, tout simplement.
Pourquoi avoir fait le choix de partir travailler à l’étranger après votre cursus à l’ESSEC ?
J’avais envie de voyager et de découvrir le monde. Ainsi, pourquoi pas allier l’utile à l’agréable ? J’ai donc saisi une opportunité pour aller travailler à Londres au début de ma carrière chez la 20th Century Fox. De plus, selon moi, il est plus facile de développer sa carrière en étant directement présent là où se situe le siège de l’entreprise, plutôt que dans une de ses filiales à l’étranger.
Sa carrière dans le milieu audiovisuel
Comment avez-vous fait pour rejoindre directement un grand groupe comme 20th Century Fox ? Qu’est-ce que cette première expérience vous a apporté ?
J’ai réussi à être recruté par la Fox à ma sortie de l’ESSEC par hasard. En effet, celle-ci venait d’ouvrir une petite filiale en France et elle proposait une offre d’emploi pour un métier spécifique. Or, il s’avère que je remplissais tous les critères et j’ai donc été embauché.
Cette expérience m’a été très bénéfique car elle m’a appris à être résilient et à toujours me porter volontaire. D’une manière générale, j’étais poussé à être consciencieux dans mon travail, tout en restant flexible en cas d’imprévu.
Vous avez eu un parcours très international (notamment aux USA), avez-vous notifié une/des différences avec la France ?
Effectivement, il y a quelques différences entre la France et les USA. Tout d’abord, les Américains travaillent un peu différemment. En général, ils sont plus ponctuels : ils arrivent à l’heure au bureau et terminent à l’heure, là où les Français ont parfois tendance à être plus laxistes.
De plus, ils sont en général plus professionnels sur certains aspects. Par exemple, il n’y a pas vraiment de bavardage au travail. Lors d’une discussion, ils vont droit au but et ne s’embarrassent pas de mettre les formes. Cela leur permet d’être plus efficaces au quotidien et de perdre moins de temps.
Comment s’est déroulé votre évolution au sein de la 20th Century Fox ? Y a-t-il eu des tournants dans votre carrière ?
Globalement, j’ai toujours cherché à saisir les opportunités qui s’offraient à moi. C’est comme ça que j’ai commencé à travailler pour cette entreprise par exemple. De la même manière, j’ai saisi l’opportunité de quitter la Fox en 2018 au profit de Paramount car l’offre proposée m’attirait plus.
Durant ces dernières années, avez-vous mené des projets dont vous êtes particulièrement fier ?
J’ai deux projets donc je suis particulièrement fier.
Tout d’abord, j’ai contribué à la sortie en DVD du premier film « Avatar » de James Cameron. C’était un véritable challenge technologique car il fallait s’assurer que le rendu final soit à la hauteur des exigences élevées du réalisateur.
Le deuxième projet a eu lieu durant la pandémie de Covid 19. J’ai été amené à gérer la sortie au cinéma et sur les plateformes de streaming du film « Love and Monster ». Bien que la conjoncture nous soit défavorable, nous avons réussi à faire en sorte que le film soit rentable, avec en prime une nomination aux Oscars pour les meilleurs effets spéciaux.
Vous avez sûrement suivi de près la grève des acteurs à Hollywood et notamment leurs réclamations en ce qui concerne la régulation de l’usage de l’IA. Quel est votre avis sur la question ?
Selon moi, il est important de protéger les acteurs et leur image. En effet, un usage excessif de l’IA pourrait faire disparaître des milliers d’emplois de comédiens car il suffit de scanner numériquement leur visage une fois pour ensuite l’utiliser à l’infini. A cet égard, les Etats-Unis s’inspirent, à raison, des régulations mises en place en Europe mais accusent néanmoins un certain retard en la matière.
En revanche, on ne peut pas ignorer toutes les possibilités qu’elle nous offre, notamment en ce qui concerne les effets spéciaux. Elle permet d’en améliorer drastiquement la qualité et permet un gain de temps considérable.
Vous avez été Head of marketing pour la Paramount. Comment avez-vous fait face à la baisse des ventes de CD au profit des plateformes de streaming ?
Effectivement, nous n’avons pu que constater une montée en puissance des séries, autrefois considérées comme inférieures, par l’intermédiaire des plateformes de SVOD comme Netflix, Amazon Prime Video, Apple TV, etc… Nous avons assisté de manière impuissante à la baisse des ventes de DVD mais nous avons cherché à nous adapter. Pour cela, il a fallu procéder un à arbitrage entre physique et digital. Par exemple, en se demandant quel produit était susceptible de passer sur le canal digital ?
Cette émergence pose aussi une autre question : s’il y a une idée de projet audiovisuel, est-ce plus judicieux de réaliser un film ou une série ? Dans le cas du film, dois-je le sortir au cinéma de manière plus traditionnelle ou directement sur les plateformes de streaming pour économiser des coûts ?
Comment voyez-vous l’avenir de ce secteur ? Quels conseils donneriez-vous à un étudiant souhaitant y travailler ?
Actuellement, je conseillerais à un jeune diplômé de travailler pour Netflix. En effet, c’est le plus gros acteur du secteur avec une position hégémonique. Nous sommes même à la limite d’une entreprise anti-concurrentielle selon moi. Malgré la baisse récente de son nombre d’abonnés, je pense que l’entreprise va garder sa position dominante. En revanche, si vous souhaitez faire carrière dans le secteur, les métiers liés au marketing et à la distribution me semblent moins viables à long terme. Je vous conseille de vous tourner vers des métiers liés à la production.
En ce qui concerne ma vision du secteur, elle est plutôt optimiste. Je ne pense pas que celui-ci va connaître une dynamique descendante.
De l'audiovisuel à l'architecture
Pourquoi quitter subitement le monde de l’audiovisuel pour celui de l’architecture ? Quels ont été les facteurs qui ont motivé votre choix ?
A 55 ans, j’étais considéré comme « trop vieux » à Los Angeles pour être à la pointe de ce secteur…
De plus, j’estimais que c’était le bon moment pour faire de ma vie ce que je voulais réellement. Ainsi, puisque le bon moment n’est pas quelque chose qui s’attend, j’ai décidé de me lancer à mon compte en tant qu’architecte d’intérieur et de me lancer dans l’entrepreneuriat.
La transition entre le salariat et l’auto-entrepreneuriat a-t-elle été brutale ? Si oui, quelles sont les difficultés majeures rencontrées ?
La difficulté majeure était surtout d’ordre financière. En effet, j’ai connu une perte de revenu importante par rapport à mon ancien poste, où j’avais une certaine ancienneté.
Globalement, c’est la difficulté la plus importante rencontrée. La gestion de mon emploi du temps ou le côté administratif n’ont été en aucun cas des obstacles. En ce qui concerne ce dernier point, il est très facile de créer son entreprise aux Etats-Unis.
7 ans après la création de votre entreprise, quel bilan en tirez-vous ?
En réalité, je suis investi dans mon entreprise à temps plein depuis seulement 3 ans.
J’en tire un bilan très positif : je connais une phase de croissance, la dynamique est bonne et mon nouveau quotidien me plaît beaucoup car il me permet d’avoir plus de temps pour moi. Les projets que j’effectue sont de plus en plus ambitieux et je ne cesse de m’améliorer en termes de niveau de connaissances.
A quoi ressemble votre quotidien aujourd’hui ?
Il consiste à effectuer des visites de clients qui souhaitent effectuer des travaux dans leur domicile. En revanche, je passe toujours beaucoup de temps sur mon ordinateur. En effet, j’utilise un logiciel de conception pour réaliser mes projets. J’échange également beaucoup avec des artisans.
Durant ces dernières années, avez-vous mené des projets dont vous êtes particulièrement fier ?
Pour l’instant, beaucoup de mes projets sont des premières. Mais je dois dire que je suis très fier d’avoir réussi la conversion d’un garage en appartement pour mon tout premier projet.
J’ai également effectué l’aménagement de 400m2 de bureau ici à Los Angeles pour une entreprise française. Au-delà de l’ampleur du projet, ma fierté provient également des retours des clients et des employés qui en étaient ravis.
Comment vous projetez-vous dans l’avenir ? Allez-vous continuer de développer votre entreprise ? Retourner à l’audiovisuel ? Changer d’activité ?
Si l’on me recontacte, je ne suis pas fermé à l’idée de retourner travailler dans le milieu de l’audiovisuel mais à l’heure actuelle, mon but premier est de développer mon entreprise et de travailler aux Etats-Unis et de potentiellement revenir en France pour travailler dans le design architectural.
Retour sur son passage à ESE
Quelles étaient vos motivations pour rejoindre le cabinet de conseil étudiant ESE ?
Je souhaitais commencer à comprendre comment fonctionnait concrètement une entreprise. De plus, je souhaitais avoir un projet commun avec des collaborateurs et entreprendre.
Je souhaitais également me faire des amis et passer du bon temps avec eux même si, à l’heure actuelle, je n’ai plus beaucoup de contacts avec les membres de mon bureau.
30 ans après, qu’est-ce que votre passage à ESE vous a apporté ?
Cette expérience m’a apporté une rigueur : j’ai appris l’organisation et développé ma capacité à me concentrer sur des tâches difficiles. J’ai appris à jongler entre ma casquette d’étudiant et celle d’un professionnel. J’aimais beaucoup la sensation de changer d’univers dès lors que je passais la porte du local.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un comme moi qui vient d’arriver dans la structure ?
Je pense qu’il est important de garder le côté convivial et décontracté de ESE. C’est selon moi une de nos forces et c’est grâce à cela que l’aventure ESE est aussi plaisante et enrichissante. Bien que l’aspect professionnel soit très important, il ne faut pas non plus devenir rigide et froid.
Nous remercions Vincent Marçais pour ce moment d’échange privilégié